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Genèse
Quand l'Union Soviétique entra en guerre contre l'Allemagne nazie, elle ne disposait pas de canons automoteurs en masse pour assurer le soutien de l'infanterie durant ses assauts ou jouer le rôle de chasseur de char. À la fin des années 30, les Russes disposaient en tout et pour tout quelques SU-5 basés sur le châssis du T-26 qui furent utilisés de façon limitée durant la campagne de Pologne en 1939. En septembre 1941, le ZiS-30 fut réalisé en tant que mesure d'urgence et transitoire tant le besoin de ce genre de char était grand. Le ZiS-30 était basé sur le tracteur d'artillerie Komsomolet doté seulement d'une faible autonomie et stabilité. Cependant, il était efficace contre tous les véhicules allemands de l'époque et était peu coûteux. Durant les années 30, plusieurs tentatives furent faites de développer des canons automoteurs et des DCA à partir du châssis du T-26.
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Design
Le SU-76 et le SU-76M étaient basé sur le châssis du T-70 dont il conservait beaucoup d'équipements et de mécanismes comme la suspension (avec ici un galet supplémentaire) et les chenilles. Cependant, le compartiment moteur était replacé au milieu pour permettre la création d'un compartiment de combat à l'arrière. Le SU-76 était propulsé par 2 moteurs GAZ-202 montés parallèlement développant au total 140 ch ce qui permettait au char une vitesse maximum d'environ 45 km/h. Sur le SU-76M, les moteurs GAZ-202 furent remplacés par 2 GAZ-203 développant au total 170 ch. Le char embarquait 420 L de carburant lui procurant une autonomie de 250 km environ. Le compartiment de combat disposé à l'arrière était entièrement clos sur le SU-76 et ouvert au-dessus et à l'arrière sur le SU-76M. L'accès au compartiment de combat et à celui du pilote se faisait via l'arrière du compartiment de combat. Les deux modèles étaient armés du ZiS-3 Mod. 1942 de 76,2mm approvisionné avec 60 obus de 76,2mm, HE pour la plupart (mais également des AP). Avec des HEAT, le ZiS-3 pouvait percer 120mm de blindage à 500 m. L'armement était parfois complété par une mitrailleuse DT de 7,62mm (libre) sur le SU-76M.
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Superstructure du SU-76 et compartiment de combat. -
Compartiment de combat et superstructure du SU-76M. -
Le blindage était assez léger, puisqu'il ne dépassait pas les 30mm à l'avant et 15mm sur les flancs. Il est vrai qu'il n'était pas conçu pour affronter d'autres véhicules blindés mais l'infanterie ennemie et les positions fortifiées. L'équipage était composé de 4 hommes : le pilote, le commandant, le tireur et le chargeur.
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Compartiment de combat du SU-76M. -
Compartiment du pilote. -
Modèles
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SU-76 (SU-12) (1942)
Le 19 octobre 1942, le GKO invita l'usine GAZ et l'usine n°38 de développer un canon automoteur léger destiné à être produit en masse, armé du canon ZiS-3 de 76,2mm et basé sur le châssis du T-70 (mais avec un galet supplémentaire). En novembre 1942, les deux usines présentèrent leurs prototypes armés chacun du canon ZiS-3Sh (Shturmovaya = Assaut) de 76,2mm. Le prototype présenté par GAZ était le GAZ-71 alors que celui présenté par l'usine n°38 était le SU-12. Le 9 décembre 1942, les deux véhicules furent comparés lors de tests et le GAZ-71 fut jugé trop peu conforme par rapport aux conceptions existantes. Le SU-12 fut donc choisi pour la production de masse sous la désignation de SU-76 et la production de masse débuta le 1er janvier 1943.
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Le SU-12 était propulsé par 2 moteurs GAZ-202 parallèles et était entièrement blindé. Le blindage était composé de plaques de 10 à 35mm d'épaisseur assemblées par soudures. Le compartiment du pilote était situé à l'avant, le compartiment moteur au milieu et le compartiment de combat à l'arrière. L'équipage était de 3 hommes et l'armement était complété par une mitrailleuse DT de 7,62mm. Les deux premiers régiments de canons automoteurs qui furent constitués en janvier 1942 étaient équipés de SU-76.
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SU-76M (SU-12M) (1943)
En raison du peu de fiabilité des moteurs parallèles utilisés sur le SU-76 dont la synchronisation était quasi impossible, la production du SU-76 fut stoppée le 21 mars 1943 alors que seulement 350 exemplaires avaient été produits. En prévision de son offensive d'été, le GKO avait peu de temps pour résoudre ce problème. Le 17 mai 1943, une version améliorée fut proposée, le SU-12M ou SU-76M fut testé et entra en production finalement en juin.
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Le SU-76M était doté d'une transmission et de 2 moteurs modernisés installés sur la caisse du SU-76. Les modifications apportées ne corrigèrent pas totalement les dysfonctionnements du SU-76. La production du SU-76M débuta en mai 1943 et se termina en 1945 avec un total de 11 300 exemplaires produits.
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Février 1943. -
Unité inconnue, été 1943. -
Unité inconnue, hiver 1943-1944. -
7e Corps Mécanisé, hiver 1943-44. -
8e Brigade de Canon Automoteur, front biélorusse, février 1944. -
6e Armée de Chars de la Garde, Autriche, avril 1945. -
5e Panzerdivision SS Wiking, Pologne, été 1944. -
Front biélorusse, hiver 1944. -
Unité inconnue, Prusse orientale, avril 1945. -
Courageux du Front Transbaïkalien, août 1945.
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Conversions
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SU-15, SU-16, SU-38 & SU-15M (1943)
Durant l'été 1943, GAZ et l'usine n°38 travaillèrent sur des projets destinés à moderniser le SU-76. GAZ proposa le GAZ-74A propulsé par un moteur diesel ZiS-16F ou ZiS-80 ou Giberson (américain) de 110 ch et armé du canon S-1 de 76,2mm. Cependant, ce projet fut abandonné et un seul véhicule expérimental fut produit. L'usine n°38 proposa quant à elle 3 prototypes différents : le SU-15, le SU-16 et le SU-38. Ces prototypes étaient armés du canon S-15 de 76,2mm et propulsés par des moteurs GAZ-203. Le SU-15 était basé sur le châssis du SU-12 et était doté d'un système de filtrage d'air amélioré et d'un compartiment de combat légèrement élargi.
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SU-15. -
SU-15M. -
Le SU-16 était basé sur le châssis et le moteur du T-70, possédait un blindage frontal de 45mm. Le SU-38 comme le SU-16 était basé sur le châssis et le moteur du T-70 mais était plus léger que le SU-16 mais surtout était doté d'un compartiment de combat situé à l'avant.
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SU-16. -
SU-38. -
Les tests comparatifs de l'été 1943 montrèrent que le SU-16 était le design le plus abouti des 3 malgré une disposition de l'équipage non optimale. Le châssis des SU-15 et SU-38 étaient surchargés causant de nombreuses pannes. Ce fut cependant le SU-15 qui fut choisi pour la production en raison de son poids moins important que les 2 autres modèles. Une version modernisée du SU-15 fut réalisée, le SU-15M doté d'un compartiment de combat ouvert au-dessus et à l'arrière, propulsé par 2 moteurs GAZ-202. En août 1943, le SU-15M passa les tests avec succès et fut accepté sous la désignation de SU-76, et le 1er octobre 1943, la production de masse débuta. À la fin de la guerre, un total de 14 292 SU-76 avaient été produits par les usines n°30 de Kirov, n°40 de Mytishchi et GAZ de Gorky.
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ZSU-37 (SU-11) (SU-37-I) (1944)
L'URSS subissait de lourdes pertes tout au long de la Seconde Guerre Mondiale dut en grande partie à une mauvaise défense aérienne. L'Armée Rouge savait dès 1942 qu'elle devait fabriquer un véhicule doté de telles capacités, surtout en grand nombre. Alors que certains chars plus lourdement armés recevaient des canons AA dans des supports de mitrailleuses, et qu'il y avait des rapports selon lesquels ils réussissaient à leurs missions, cela n'était pas suffisant et un véhicule spécialisé était nécessaire. Selon Zaloga, 6% des pertes de chars soviétiques pouvaient être attribuées aux avions ennemis, soit une moyenne de 90 par mois en 1944. Il était clair qu'un nouveau véhicule était nécessaire. La défense AA soviétique s'appuyait fortement sur le canon quad-Maxim, qui était parfois monté sur des camions GAZ. Des canons ZiS-42 de 25mm étaient montés sur des camions similaires. Cependant, il y avait un désir pour un SPAAG blindé. La première idée d'un véhicule blindé SPAAG est née en 1942, lorsqu'une tourelle de mitrailleuse double DShK de 12,7mm avec viseurs optiques fut construite et pouvait être montée sur le T-60. Plus tard, le T-90 (basé sur le T-70) fut construit, avec un armement similaire. Cependant, le programme fut annulé en 1943, au profit du ZSU-37, construit sur un SU-76. Zavod n°37 reçut le projet. Le premier prototype utilisait le châssis SU-76 d'origine et avait des problèmes de transmission, ainsi que des problèmes de rotation de la tourelle. Après une refonte utilisant la caisse du SU-76M, il fut accepté pour la production en 1944.
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Le ZSU-37 fut produit de 1944 à 1948, et 75 véhicules furent construits au total (seuls quelques véhicules furent produits avant la fin de la guerre). Il ne vit aucun service pendant la Seconde Guerre Mondiale car la Luftwaffe n'envoyait plus de missions au printemps 1945. Cependant, il y avait un bataillon d'artillerie AA automoteur équipé de 12 ZSU-37 à la fin de 1945. Après la Seconde Guerre Mondiale, il fut décidé que la faible cadence de tir et la faible puissance de feu du canon AA de 37mm n'étaient pas efficaces contre les cibles à basse altitude et à grande vitesse. Les équipages découvrirent qu'il était très difficile de suivre manuellement des cibles se déplaçant rapidement en raison de la faible vitesse de rotation de la tourelle. Les SPAAG construits sur un châssis de char léger avaient également une maniabilité assez faible sur des terrains plus difficiles, une vitesse et une portée tout-terrain médiocres par rapport aux chars moyens et aux canons automoteurs, que le ZSU-37 était censé protéger pendant une attaque aérienne. Le ZSU-37 fut finalement retiré en raison des problèmes auxquels il était confronté et la production fut interrompue au profit de nouveaux projets. Le ZSU-37 avait une tourelle à toit ouvert, armée d'un canon automatique 61-K Mod. 1939 de 37mm. Le véhicule avait également un viseur automatique, un télémètre stéréo, une radio puissante, un système d'interphone avancé et des mécanismes de visée mécaniques avec 2 taux de mouvement angulaire pour une vitesse et une fluidité de visée adéquates. Tout cela augmentait considérablement les capacités du véhicule car le commandant serait en mesure de diriger rapidement l'équipage et les artilleurs pouvaient tirer efficacement sur la cible, en théorie. Cependant, comme indiqué, les inconvénients du châssis et du système de tourelle signifiaient qu'il s'agissait simplement d'une mauvaise conception. L'équipage était composé de 6 hommes : un conducteur, un tireur pour l'azimut, un autre pour l'élévation, un ajusteur de visée pour la vitesse et la portée cibles, un ajusteur de visée pour la trajectoire cible et l'angle de plongée, et un chargeur.
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Pour protéger l'équipage de la pluie et de la neige, le compartiment de combat pouvait être recouvert d'une bâche. Cependant, le canon ne pouvait pas être complètement élevé lorsqu’elle était mise. La tourelle ouverte présentait des avantages, tels qu'un angle d'élévation généralement plus élevé, une bien meilleure visibilité pour les artilleurs et aucun besoin de ventilation, ce qui aurait autrement compliqué la production. Léger et maniable, le ZSU-37 était considéré comme un SPAAG assez efficace au milieu des années 40 (relativement parlant, car l'URSS n'avait que le T-90 et les camions SPAAG pour le comparer). Cependant, il présentait des inconvénients fondamentaux tels que la tourelle, des capacités tout-terrain insuffisantes pour accompagner les chars moyens et lourds sur des terrains difficiles, d’où sa disparition. Les munitions se composaient de 320 AP-T, HEFI-T. 130 obus étaient dans des boîtes de 5 et 190 autres à l’air libre. Les APCR pouvaient, en théorie, être utilisés contre les chars lourds ennemis. La vitesse initiale était comprise entre 870 et 960 m/s, selon le type d’obus ; l'AP-T pesait 770 g, les HEFI-T pesaient 730 g et les HVAP-T étaient à 620 g. Le canon automatique pouvait être relevé et abaissé entre -5 et +85°. La cadence de tir pratique était d'environ 50 à 60 coups/min. La portée de tir max était de 2,5 km tandis qu’à la verticale elle atteignait 6,5 km.
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Hiver 1945. -
SU-85A & SU-85B (1944)
SU-76M armé d'un canon de 85mm (respectivement D-5S et LB-2), prototype uniquement.
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SU-85A. -
SU-85B.
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En Action
Les premiers SU-76 furent incorporés dans des régiments d'artillerie automotrice mixte durant l'été 1943. Ces régiments étaient supposés avoir chacun 4 batteries de 5 SU-76 et un SU-76 de commandement. Le SU-76 était conçu pour soutenir les assauts de l'infanterie et non pour combattre les chars ennemis, tâche laissée aux canons automoteurs basé sur les T-34, KV-1 ou IS-2, plus puissants. À la fin de l'année 1944, les SU-76 furent incorporés dans des batteries d'artillerie automotrice légère dotées de 16 véhicules chacune, faisant parties des divisions d'infanterie régulières. Malgré tout, quelques-uns des obus embarqués par le SU-76 étaient des HEAT en cas de rencontre impromptue. Les plus gros avantages du SU-76 étaient sa silhouette basse, sa grande mobilité et sa faible pression a sol qui lui permettait d'opérer dans les zones forestières et marécageuses avec le soutien de l'infanterie détruisant tous les points fortifiés rencontrés.
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SU-76M à Berlin devant un magasin de vin en ruine, 1945. -
À la fin de la guerre, le SU-76 fut également utilisé pour le combat de rue mais la superstructure semi-ouverte du véhicule était un net désavantage dans ce genre d'opération en cas de contre-attaque de l'infanterie ennemie, des tirs des snipers ou des lancers de grenades. Cependant, cette superstructure rendait inefficace tout type de HEAT. Les premiers SU-76 furent livrés le 1er janvier 1943 et furent envoyés à l'école de l'artillerie automotrice. À la fin du mois, 2 régiments mixtes d'artillerie automotrice (1433 et 1434èmes régiments) furent envoyés sur le front de Volkhov et en mars 1943, 2 autres régiments (1485 et 1487èmes régiments) furent constitués et envoyés sur le front ouest. En 1943, un régiment d'artillerie automotrice légère avait en son sein 21 SU-76M. Fin 1944-début 1945, 17 batteries d'artillerie automotrice de 16 véhicules chacune furent constituées et attachées aux divisions de canons. Dans la première moitié de 1944, les brigades d'artillerie automotrice légère de la réserve du Haut Commandement (RGK) furent crées avec chacune 16 SU-76M et 5 T-70.
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Les troupes de l'Armée Rouge et les combattants du soulèvement tchèque sur un SU-76M roulant le long des rives de la Vltava à Prague libérée, 1945. -
À la fin de la Seconde Guerre Mondiale, l'Armée Rouge avait 119 régiments d'artillerie automotrice légère et 7 brigades d'artillerie automotrice. L'Armée Polonaise fut également dotée de 130 SU-76M. L'Armée Rouge les utilisa jusque dans les années 50.
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SU-76 nord-coréen de construction russe examiné par du personnel américain, y compris un commandant de la marine, après avoir été détruit par les forces des Nations Unies au début des combats de la Guerre de Corée, 1950.
SU-76