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Genèse & Production
La nécessité de créer un char lourd ayant un blindage conséquent fut bien comprise en URSS. Selon la théorie militaire russe, de tels chars étaient nécessaires pour ouvrir le front ennemi et organiser une percée ou surmonter des zones fortifiées. La plupart des armées des pays développés du monde avaient leurs propres théories et pratiques pour surmonter les puissantes positions fortifiées de l'ennemi ; l'expérience en la matière fut acquise pendant la Première Guerre Mondiale. Des lignes fortifiées modernes telles que, par exemple, la Ligne Maginot ou la Ligne Siegfried étaient considérées même théoriquement infranchissables. Il y avait une opinion erronée selon laquelle le char avait été créé pendant la Guerre d’Hiver pour percer les fortifications finlandaises à long terme (Ligne Mannerheim). En fait, la conception du char commença dès la fin de 1938, lorsqu'il devint finalement clair que le concept d'un char lourd multi-tourelles comme le T-35 était une impasse. Il était évident que la présence d'un grand nombre de tourelles, bien qu'un avantage en termes de puissance de feu, entraîne inévitablement des effets secondaires sous la forme d'une conception plus complexe et, par conséquent, son coût plus élevé, sa vitesse de production plus faible et sa fiabilité moindre. Et les dimensions gigantesques du char ne font que l'alourdir, le démasquer et ne permettent pas l'utilisation d'un blindage suffisamment épais. L'initiateur de la création du char était le chef de l'ABTU du commandant de l'Armée Rouge D.G. Pavlov. À la fin des années 30, des tentatives furent faites pour développer un char de taille réduite (par rapport au T-35), mais avec un blindage plus épais. Cependant, les concepteurs n'osèrent pas abandonner le concept multi-tourelles : on pensait que l’arme principale combattrait l'infanterie et supprimerait les points de tir, et le second devait être antichar pour combattre les véhicules blindés.
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Prototype. -
Prototype du KV-1 (U-0) avec ses 2 canons (L-11 de 76,2mm et 20-K de 45mm). -
Les nouveaux chars créés selon ce concept (SMK & T-100) étaient à double tourelle, armés de canons de 76mm et 45mm. Et seulement à titre expérimental, ils développèrent également une version plus petite et mono-tourelle du SMK. De ce fait, la longueur du véhicule fut réduite (de 2 galets), ce qui eut un effet positif sur la mobilité. Contrairement à son prédécesseur, le KV (comme on appelait ce char expérimental) reçut un moteur diesel. Le premier exemplaire du char (U-0) fut fabriqué à l'usine de Leningrad Kirov (LKZ) en août 1939. Initialement, le principal concepteur du char était A.S. Ermolaev, puis N.L. Dukhov. Le 30 novembre 1939, la Guerre d’Hiver éclata. Les militaires ne manquèrent pas l'occasion de tester de nouveaux chars lourds. La veille du début de la guerre (29 novembre 1939), les SMK, T-100 et KV partirent au front. Ils furent remis à la 20ème Brigade de Chars Lourds, équipée de T-28. Le KV remporta sa première bataille le 17 décembre lors de la percée de la zone fortifiée de Hottinensky de la Ligne Mannerheim. Le char passa avec succès les tests de combat : pas un seul canon ennemi ne put le toucher. L'armée n'était contrariée que par le fait que le canon L-11 de 76mm n'était pas assez puissant pour faire face aux casemates. À cette fin, il était nécessaire de créer un nouveau char, le KV-2, armé d'un obusier de 152mm. Sur recommandation du GABTU, par une résolution conjointe du Bureau Politique du Comité Central du Parti Communiste Bolchevik de toute l'Union et du Conseil des Commissaires du Peuple de l'URSS du 19 décembre 1939 (déjà un jour après les tests), le KV fut mis en service. Quant aux SMK et T-100, ils se présentèrent également sous un jour plutôt favorable (cependant, le SMK fut détruit par une mine au début des hostilités), mais ils ne furent pas acceptés en service, car avec une puissance de feu plus élevée, ils avaient un blindage moins épais, des dimensions et un poids plus importants, ainsi qu’une moins bonne mobilité. Le KV-1 ne fut produit que par une seule usine, l'usine n°100 Kirovsky de Leningrad (LKZ). Cette usine en 1941, fusionnera avec d'autres usines et sera relocalisée derrière l'Oural à Tcheliabinsk (ChTZ ou Tankograd). Les chiffres sur la production du KV-1 ne sont guère précis et pour tout dire inexistants. Le premier modèle appelé KV-1 Mod. 1939 fut produit à environ 100 exemplaires en 1940 par la LKZ. Le second modèle appelé KV-1e Mod. 1940 fut produits à plusieurs milliers d'exemplaires (?) par la LKZ durant le printemps et l'été 1941, le troisième modèle appelé KV-1 Mod. 1941 fut lui aussi produit à plusieurs milliers d'exemplaires en 1941-1942 par la LKZ puis par la ChTZ. En fait, les seuls chiffres précis étaient pour le KV-1S qui fut produit à 1 370 exemplaires d'août 1942 à avril 1943 par la ChTZ.
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KV-1 à la fin de l'assemblage. -
En mai 1940, un premier plan de production prévoyant 200 unités fut accepté mais les tests sur le char ne furent cependant pas terminés et de nombreux défauts subsistaient encore. Les tests reprendront en mai 1940 à Koubinka et dans la région de Leningrad. Après que le KV-1 ait été testé sur 2 648 km, de nombreux problèmes techniques furent remarqués notamment au niveau de la transmission, de la boîte de vitesse et du châssis. Cependant la production était lancée et ne fut pas stoppée, bien que les ingénieurs du SKB aient proposé de corriger ces défauts. Le KV-1 fut produit jusqu'en 1942 et fut peu modifié. Ces modifications cependant donneront naissance à 4 modèles de KV-1. En février 1940, le KV-1 fut utilisé pour la toute première fois au combat en Finlande. Lors du début de l’opération Barbarossa, les Russes en disposaient 635 et lors de la Bataille de Moscou : 1 364. Début 1943, en raison des performances des canons allemands, la production du KV-1 fut stoppée et ce-dernier fut remplacé par le KV-85 sur les chaînes de montage.
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Présentation succincte du KV-1 (ici un Mod. 1942) par l’historien David Fletcher au Tank Museum, Bovington, 15 décembre 2018. -
Design
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Compatiment Avant
L'équipage du KV-1 était composé de 5 hommes dont 3 étaient assis dans le compartiment de combat : le pilote (mécanicien), le copilote et l'opérateur radio. Le pilote était assis au centre, à l'avant et l’on peut voir son sabord blindé de vision sur la plaque frontale de la superstructure. Pour sa vision, il disposait en plus d'un périscope sur le plateau avant, légèrement décalé vers la droite. L'unique phare avant du KV-1 était situé à droite du sabord de vision. Sur le KV-1 Mod. 1939, il n'y avait pas de mitrailleuse de caisse, mais sur les modèles suivant une mitrailleuse DT de 7,62mm fut installée sur rotule, à la gauche du sabord de vision. Pour accéder à l'intérieur de la caisse, une trappe ronde était présente sur le plateau avant. Le KV-1 disposait d'une boîte de vitesse comportant 5 rapports en marche-avant et 1 marche arrière, cette boîte était de mauvaise qualité, ce qui handicapa fortement le KV-1 durant tout son service. La direction était donnée en freinant sur une des 2 chenilles ou en modifiant la puissance transmise à l'un des barbotins arrière.
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Avant du KV-1 Mod. 1939 sans arc pour mitrailleuse. -
Pont avant avec trappe du conducteur. -
Le reste du compartiment avant était consacré au poste de combat. Le KV-1 n'avait pas de puits de tourelle, ce qui veut dire que le commandant-chargeur et le tireur étaient debout sur le plancher du poste de combat lors des engagements. Ils suivaient donc la rotation de la tourelle en marchant sur ce plancher qui était encombré par différents équipements comme par exemple les coffres à munitions. Le KV-1 transportaient 111 obus de 76,2mm (L-11 et F-32) ou 114 autres obus de 76,2mm (F-34 et ZIS-5). Sur le KV-1S armé du ZIS-5, il n'y avait que 102 obus de 76,2mm. Pour ses mitrailleuses DT de 7,62mm, le KV-1 disposait de 3 024 balles. Le poste de combat était séparé du compartiment moteur par une cloison pare-feu. Au niveau externe, le nez de la caisse était de forme pointue et équipée de 2 boucles de remorquage.
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Avant standard avec arc pour mitrailleuse. -
Compatiment de Combat
Les premiers KV-1 furent armés du canon L-11 L/30,5 Mod. 1938/39 de 76,2mm. À partir de la fin de 1940, il fut remplacé par le canon F-32 de 76,2mm plus moderne (KV-1e Mod. 1940). En juillet 1941, le F-32 fut lui-même remplacé par le nouveau canon ZIS-5 de 76,2mm similaire au F-34 qui équipait les T-34 (et quelques KV-1). Ce nouveau canon fut installé dans une nouvelle tourelle moulée (la précédente était soudée) avec un blindage plus épais. Ce canon équipait les KV-1 Mod. 1941 et KV-1S. Ce dernier reçut une nouvelle tourelle moulée avec une coupole de commandant.
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Intérieur de la tourelle. -
Le L-11 et le F-32 étaient dotés d'une lunette télescopique TOD-6 et de 2 périscopes panoramiques PT-6 alors que le F-34 et le ZIS-5 étaient dotés d'une lunette télescopique TMFD et de 2 périscopes panoramiques PTK. Sur le toit de la tourelle venaient s'ajouter 4 périscopes fixes et de chaque côté une fente de vision. L'accès à la tourelle se faisait via la trappe du commandant sur le toit. Notons que sur le KV-1S, il y avait 2 trappes d'accès (coupole de commandant et trappe du tireur). L'armement de la tourelle était complété par 2 mitrailleuses DT de 7,62mm. La première était montée coaxiale au canon de 76,2mm, alors que la seconde était montée sur rotule à l'arrière de la tourelle. Notons encore qu'au niveau des formes, les tourelles des différentes versions du KV-1 étaient angulaires sauf pour celle du KV-1S qui était de forme arrondie.
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Compatiment Moteur
Le moteur standard du KV-1 est le V12 diesel V-2K (refroidi à l'eau) développant 600 ch à 2 000 t/min. Ce moteur était installé dans le compartiment arrière avec la transmission. Le KV-1 transportait 600 L de diesel dans ses réservoirs internes mais pouvait être également doté de réservoirs externes. Les 600 L lui permettait une autonomie sur route de 250 km. Le moteur diesel était peu gourmand et ne consommait que 240 L aux 100 km. En raison de son poids, le KV-1 ne pouvait qu'atteindre les 35 km/h sur route. Pour rendre le KV-1 plus rapide, les ingénieurs créèrent un nouveau modèle, le KV-1S doté d'un blindage moins important et doté du nouveau moteur diesel V12 V-2KS. Ce moteur développait toujours 600 ch mais à seulement 1 900 t/min. Grâce à ces changements, le KV-1S pouvait désormais atteindre les 43 km/h sur route.
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Arrière de caisse. -
Pont arrière. -
Le moteur du KV-1 était surmonté par un plateau arrière (qui faisait saillie à l'arrière) composée de 2 plaques. La plaque juste derrière la tourelle était munie de 2 grilles de ventilation, une trappe boulonnée entre les grilles (avec un large couvercle en forme de dôme protégeant l'entrée d'air du ventilateur) et 2 petites pipes de ventilation. L'autre plaque, boulonnée, était dotée de 2 petites trappes de maintenance. La plaque arrière du bas de caisse n'était doté que de 2 boucles de remorquages.
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Suspension
La suspension du KV-1 était à barres de torsion. Il y avait de chaque côté 6 petits galets double à bandages en acier, une poulie de tension double montée à l'avant et un barbotin double monté à l'arrière ainsi que 3 rouleaux porteurs double également. Il est intéressant de noter que les galets étaient disposés de manière inégale tout au long du bas de caisse.
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Train de roulement. -
Le KV-1 était doté de chenilles en acier de 65 cm de large à guides centraux. Ces chenilles comprenaient chacune 87 (90 ?) sections. Les chenilles étaient en contact avec le sol sur 4,33 m. Les chenilles de 65 cm offraient une pression au sol de 0,77 kg/cm². Le KV-1S était équipé de chenilles de 67 cm de large offrant une pression au sol moindre : 0,73 kg/cm².
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Blindage
Le blindage du KV-1 était très lourd pour cette époque. Rappelons que les KV-1 furent conçus au début de la guerre. Avec un blindage frontal (et latéral) de 75mm, il était quasi indestructible pour les canons allemands de cette époque. En effet, les canons de 37mm et de 75mm (à tube court) des Panzers III et IV ne pouvaient pas percer les plaques frontales du KV-1. La situation était encore pire avec le KV-1e qui était doté d'un blindage appliqué (plaques supplémentaires) de 35mm, ce qui faisait un blindage frontal de 110mm (comme le Tiger) ! Bien entendu le prix à payer se situait au niveau de la mobilité et le KV-1 ne pouvait rivaliser avec le T-34 à ce niveau. Pour résoudre ce problème, les ingénieurs russes réduiront (sur le KV-1S) l'épaisseur du blindage au niveau du bas de caisse, permettant ainsi de récupérer quelques km/h. Plus tard, avec l'accroissement de l'efficacité et de la puissance de feu des canons allemands, le KV-1 perdit une partie de son invincibilité mais garda cependant tout au long de sa carrière un excellent indice de protection. Notons encore que les plaques de blindage étaient soudées entre-elles pour la caisse, de même que pour la tourelle. Cependant, le KV-1 Mod. 1941 et le KV-1S seront équipés de tourelles moulées.
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Modèles
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KV-1 Mod. 1939 (KV-1) (1939)
Ce premier modèle connu de nombreux ennuis au niveau de l'embrayage et de la transmission. Il était propulsé par le même moteur que le T-34, le V12 diesel V-2K développant 600 ch et était armé du même canon que les premiers T-34, le L-11 de 76,2mm. Les plaques de blindage était soudée entre-elles et le blindage frontal maximum était de 75mm (90mm pour le bouclier du canon). Son poids était de 43,5 t. Ce modèle n'avait pas de mitrailleuse de caisse.
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Unité inconnue, Armée Rouge, URSS, été 1941. -
KV-1 Mod. 1940 (KV-1A) (1940)
Le canon de 76,2mm était trop compliqué à produire et peu performant au combat. Il fut donc remplacé par un canon plus long : le F-32. Une troisième mitrailleuse DT fut installé sur rotule sur la caisse. Ce modèle fut fabriqué par 2 usines : l'usine n°100 Kirovski à Leningrad (LKZ) et l'usine de Chelyabinski (ChTZ) (Tankograd). Les chars provenant de la première usine étaient assemblés par soudures uniquement alors que ceux provenant de la seconde étaient assemblés par boulonnage suivi d'une soudure.
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KV-1 Mod. 1940 dans un musée près de Kirovsk. -
124ème Brigade de Chars, Front de Leningrad, hiver 1941. -
KV-1e Mod. 1940 (e pour ekranami = blindage appliqué) (1940)
En 1940 sortit un nouveau modèle doté de plaques de blindage supplémentaires et d'un nouveau canon de 76,2mm, le KV-1e. Ces plaques de 35mm d'épaisseur étaient boulonnées sur la plaque frontale du bas de caisse, la plaque frontale de la superstructure, les côtés de la superstructure et de la tourelle. Ce nouveau modèle était armé du canon F-32 de 76,2mm (obus plus performants) dans une nouvelle tourelle moulée. L'augmentation du blindage fit passer le poids du char à 47,5 t, ce qui réduisit sa vitesse maximum (30 km/h à la place de 35 km/h). Pour compléter l'armement, une mitrailleuse de caisse montée sur rotule fut installée sur la plaque frontale de la superstructure, à droite.
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KV-1e Mod. 1940 capturé par les finlandais. -
KV-1 Mod. 1941 (KV-1B) (1941)
En 1941 sortit un nouveau modèle doté du tout nouveau canon ZIS-5 de 76,2mm (parfois le F-34). À part le canon et un poids de 45 t, il n' y avait pour ainsi dire aucune différence sinon la mitrailleuse de caisse, entre le modèle de 1940 et celui de 1941.
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Tourelle soudée. -
Tourelle en fonte. -
Unité inconnue, Armée Rouge, URSS, été 1942. -
KV-1 Mod. 1942 (KV-1C) (1941)
En décembre 1941, l'usine n°200 proposa une nouvelle tourelle moulée semblable à celle du KV-1 Mod. 1941, mais renforcée avec un blindage atteignant désormais 120mm. Cependant, grâce à une bonne répartition du blindage la masse n’augmenta pas. La nouvelle tourelle était protégée par un anneau plus large et la mitrailleuse arrière possédait un collier de blindage. La plage arrière fut remplacée par une plaque de blindage plate bien plus facile à manufacturer, et le blindage maximum de la caisse passe à 110mm. Cette augmentation du blindage surchargea les galets et un nouveau modèle moulé à « ailettes », plus résistant (mais aussi plus économique) fut donc conçu pour compenser.
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Unité inconnue, Armée Rouge, URSS, été 1943. -
KV-1S (1942)
En 1942, sortit une version allégée du KV-1, pour rendre celui-ci plus rapide pour se rapprocher du T-34. Cette version était dotée d'une tourelle légèrement plus petite (avec coupole de commandant) ainsi que d'un blindage plus léger sur certaines parties. Le canon était comme sur le Mod. 1941, le ZIS-5 de 76,2mm. Ce nouveau modèle fut également équipé d’une version améliorée du moteur diesel V12 V-2K, le V-2K-S (d'où le "S" (skorostnoy = vitesse) du KV-1S). Ce moteur développait toujours 600 ch mais avec seulement 1 900 t/min à la place de 2 000 pour le V-2K. Les galets furent remplacés par des plus légers et de nouvelles chenilles de 67 cm de large furent installées. La boîte de vitesse fut également remplacée. Tous ces changements permettaient au KV-1S d'atteindre les 43 km/h sur route.
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Durant l'été 1943, le prototype fut testé et le 20 août 1942, la production débuta. Cependant lors de son apparition, l'Armée Rouge avait un urgent besoin de chars mieux protégés ! Sa production fut supprimée en avril 1943.
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KV-1S en service, fin 1944-début 1945.
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Conversions
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KV-2 (1940)
Voir KV-2.
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KV-3 (Obyekt 150) (T-150, 220) (T-220, 221, 222, 223) (1941)
L’Obyekt 150 ou T-150 fut développé sur la base du KV-1 et différait de ce dernier par l'épaisseur plus importante du blindage maximum de la caisse qui passa de 75mm à 90mm. La tourelle du T-150 avait une coupole de commandant dotée d'un périscope et de 3 blocs de vision. En raison de l'augmentation du blindage, le char pesait maintenant 50 t, ce qui nécessita l'installation d'un moteur diesel V-2K dopé à 700 ch. Entre le 15 janvier et le 14 février 1941, le T-150 fut testé sur terrain et révéla plusieurs déficiences au niveau du moteur qui avait tendance à surchauffer trop rapidement. Le T-150 fut donc renvoyé à l'usine de Kirov pour que le système de refroidissement soit renforcé.
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Modèle expérimental. Châssis plus long (7 galets par côté). Blindage : 100mm. Nouveau moteur V-2SN de 850 ch avec turbocompresseur. Nouvelle tourelle en forme de diamant avec canon F-30 de 85mm. Le prototype unique, construit en 1941, fut perdu au combat après un coup direct sur la caisse frontale par un obusier sFH 18 de 150mm en décembre 1941. -
Le 15 mars 1941, le T-150 fut accepté pour la production de masse sous la désignation KV-3. Cependant, ce fut la caisse du KV-220 qui fut finalement utilisée pour servir de base au KV-3. Le 20 avril 1941, un nouveau moteur fut installé sur le KV-220 qui pesait désormais 70 t. Cependant l'ensemble moteur-transmission-suspension était insuffisant pour supporter un tel poids comme le démontrèrent les essais effectués en mai 1941. Le 20 mai 1941, le KV-220 fut renvoyé à l'usine pour réparation où il reçut un nouveau moteur, le V-2SN diesel de 850 ch. Le KV-220 fut de nouveau testé entre le 30 mai et le 22 juin 1941. Pendant ce temps, le développement de la tourelle forgée avait pris du retard qui se répercuta sur le développement global du KV-3. Durant cette période, les services secrets soviétiques prirent connaissance que le développement de chars lourds en Allemagne était déjà bien avancé et qu’aucun canon russe n'était à ce jour capable de percer le blindage de ces nouveaux modèles. Il s'agissait en fait de désinformation de la part des Allemands. En fait, les Russes crurent que les essais effectués avec des canons AA de 88mm Flak 18/36 sur des chars capturés étaient les prémices du développement de nouveaux canons destinés à de nouveau modèles ultra-blindés. Cette méprise eut pour conséquence, le 7 avril 1941, de modifier les spécifications requises pour le KV-3, qui seront en fait reprises pour le KV-4 et le KV-5. Finalement en octobre 1941, les caisses de KV-3 et de KV-220 qui avaient été sauvée des Allemands avant la prise de Kirov par ceux-ci, furent équipés de tourelles de KV-1. Ces chars furent effectivement utilisés au combat. Tous ces modèles étaient équipés du canon F-32 de 76,2mm.
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Armé d'un canon F-34 de 76,2mm. -
La caisse de l'Obyekt 223 était construite et testée avec des poids pour simuler la nouvelle tourelle conique (abritant un canon ZiS-6 de 107mm) qui fut conçue pour cela. La production en série devait commencer fin 1941, mais l'invasion allemande de l'URSS stoppa ces plans et le seul prototype de la caisse fut détruit. -
KV-4 (Obyekt 224) (1941)
Le développement du KV-4 débuta en avril 1941 à Kirov. Tous les ingénieurs du bureau de conception de cette usine furent engagés dans une compétition afin de concevoir un char armé de 2 canons et doté d'un blindage de 125-130mm, ce qui n'avait jamais été tenté auparavant. Il fut donc nécessaire de rallonger le châssis du KV-1 et inévitablement augmenter le poids du char. Cette compétition donna naissance à plusieurs concepts originaux de 80 à plus de 100 t. Des versions armées d'un canon de 107mm et de canons de 45mm ou de 76,2mm, sur 1 ou 2 tourelles ou encore en casemate virent le jour sous le crayon des ingénieurs de Kirov. Un seul rejeta l'idée d'un char multi-canons et proposa une version armée d'un canon de 107mm dans une tourelle conventionnelle avec mécanisme d'auto-chargement (N. Tseits). Certains ingénieurs recommandèrent l'installation d'un lance-flamme sur ce modèle. Sur certaines propositions, le moteur et la transmission étaient placés à l'avant. En tout, 20 variantes furent mises sur papier durant la période de troubles qui précéda le début de la Grande Guerre Patriotique en 1941. Tous ces concepts originaux ne furent jamais réalisés.
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Armé d'un canon de 107mm en casemate et d'un canon de 45mm dans la tourelle. -
Armé d'un canon de 107mm dans la tourelle principale et d'un canon de 45mm dans la tourelle secondaire supérieure. -
KV-5 (Obyekt 225) (1941)
Le développement du KV-5 (Obyekt 225) débuta en juin 1941. Il s'agissait d'un char lourd à l'aspect plutôt étrange. À l'avant, le pilote et le radio-mitrailleur disposaient chacun d'une coupole. Derrière ces coupoles, il y avait l'imposante tourelle qui accueillait le commandant, le tireur et le chargeur. Cette tourelle était équipée d'une coupole de commandant et d'une coupole de tir avec mitrailleuse DT. La tourelle pivotait sur une large circulaire d'un diamètre de 1,84 m. Le blindage max atteignait les 150-180mm.
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Plus tard, la notion de tourelle forgée fut abandonnée au profit d'une tourelle soudée. De plus comme il n'y avait pas de moteur diesel de 1 200 ch disponible, 2 moteurs diesel de 600 ch furent installés parallèlement. En août 1941, le KV-5 était pratiquement finalisé et la production de certains équipements avait déjà commencée. Cependant, en raison de l'avancée des armées allemandes vers Kirov, la production fut stoppée et remplacée par celle des modèles standards.
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Armé d’un canon de 107mm. -
KV-7-1 (Obyekt 227) (U-13) (1941)
À la fin de 1941, alors que la production de la série KV avait été déménagée derrière l'Oural, le SKB-2 reçut l'ordre de développer un modèle amélioré doté d'un meilleur canon et avec une mobilité améliorée. En 1942, plusieurs variantes furent proposées. Une de cette version, fut l’Obyekt 227, un canon automoteur sans tourelle mais avec une superstructure blindée avant dotée d'un blindage de 100mm. À cette époque il n'y avait guère de calibre important disponibles, et le canon de 76,2mm fut conservé. Cependant, pour augmenter la puissance de feu du nouveau modèle, 2 canons de 45mm furent également montés (coaxialement).
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Le développement qui avait débuté à la mi-novembre 1941, se termina le 29 décembre. Ce modèle désigné KV-7 (également KV-7-1) fut envoyé à Moscou avec le KV-8 et la seconde version du KV-7, le KV-7-2, pour y être jugé par Staline. Le KV-7-1 comme son frère le KV-7-2 ne fut pas accepté pour la production. Comme précité, le KV-7-1 était armé d'un canon ZIS-5 de 76,2mm et 2 canons coaxiaux Mod. 1938 de 45mm. Ce montage multiple avait une élévation de +15° et une dépression de -5° et pouvait pivoter sur 7,5° de chaque côté. Le KV-7-1 transportait pour le canon de 76,2mm, 93 obus et pour ses 2 canons de 45mm, 200 obus. L'armement était complété par 3 mitrailleuses DT de 7,62mm (2 montées sur rotule à l'avant et à l'arrière du compartiment de combat et 1 autre sur une coupole sur la trappe du compartiment de combat). Ce modèle pesait 45 t et avait un équipage de 6 hommes.
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Les véhicules ne furent pas mis en service principalement parce qu'ils ne pouvaient pas combattre de chars (les KV-7 n'avaient qu'une traversée de canon de 15° de chaque côté) et ne pouvaient pas détruire des bunkers en béton en raison du petit calibre des canons. Après l'échec du KV-7, il fut décidé de mettre un canon de 152mm dans la casemate au lieu de 3 plus petits ; cela conduisit au développement du SU-152. -
KV-7-2 (U-14) (1941)
Parallèlement à la première version, une seconde version du KV-7 fut également développée. Cette version était aussi équipée de canons multiples, consistant en 2 canons ZIS-5 de 76,2mm montés coaxialement. L'armement était complété par 2 mitrailleuses DT de 7,62mm (face avant et face arrière). Pour ses canons, le KV-7-2 transportait 150 obus de 76,2mm. Finalisé à la fin de décembre 1941, le prototype fut envoyé à Moscou.
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Le KV-7-2 fut jugé inutilisable et la préférence fut donnée au KV-8. En fait le concept de canons multiple n'était plus très populaire, Staline à lui-même dit qu'il fallait mieux monté un seul canon, mais un bon !
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KV-8 (Obyekt 228) (1941)
Les lance-flammes étaient généralement utilisés contre des positions renforcées en raison de leurs grands effets psychologiques. On décida donc de monter sur le KV-1 un tel équipement. Le travail sur cette conversion débuta en novembre 1941 à Tchelyabinsk (ChKZ) sous la dénomination de KV-8. Avant cela, des chars légers comme le T-26 étaient utilisés comme base pour une telle conversion, mais ils étaient trop peu protégés. En effet, les chars-lance-flammes étaient des objectifs prioritaires pour les canons allemands. Malheureusement sur le KV-1, il n'était pas possible d'installer de concert le canon de 76,2mm et le lance-flamme ATO-41 dans la tourelle et le canon de 76,2mm fut supprimé au profit du canon M1932 de 45mm moins encombrant. Pour ne pas rendre ce changement trop évidant à l'ennemi un tube factice était installé sur le tube du 45mm pour simuler le 76,2mm. Le KV-8 transportait 92 obus de 45mm et 960 L d'un mélange inflammable permettant 107 projections. L'armement était complété par une mitrailleuse DT de 7,62mm montée à l'avant de la caisse et par une autre mitrailleuse montée à l'arrière de la tourelle. Certains modèles furent équipés d'une mitrailleuse AA. Le total de munitions de 7,62mm transportées étaient de 3 400.
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KV-8S. -
Le lance-flamme ATO-41 monté coaxialement, avait une cadence de tir de 3 projections toutes les 10 s. Chaque projection consommait 10 L de liquide inflammable. Par rapport au OT-34 (version lance-flamme du T-34), le KV-8 embarquait plus de liquide inflammable. Les deux chars étaient versés dans des bataillons indépendants lance-flammes. Chaque bataillon était équipé de 2 compagnies de KV-8 (2x10) et 1 compagnie d’OT-34. Quand la production du KV-1 fut supprimée, le KV-1S fut utilisé pour réaliser la conversion et le nouveau modèle fut baptisé KV-8S. Le KV-8S transportait 114 obus de 45mm et 600 L de liquide inflammable (60 projections). Notons encore que durant la production, l'ATO-41 fut remplacé par l'ATO-42.
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503ème Bataillon Blindé Indépendant, Front de Volhovsky, été 1942. -
KV-8M
Version améliorée du KV-8S. Équipé de 2 lance-flammes. Deux prototypes furent construits.
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KV-9 (Obyekt 229) (1941)
Le KV-9 fut la dernière tentative de réarmer le KV-1 avec un plus gros calibre, ici l'obusier U-11 de 122mm. Le travail sur ce nouveau canon automoteur débuta en novembre 1941 à ChTZ (avec l'aide d'ingénieurs de l'Uralmash) et continua jusqu'en avril 1942. En plus du prototype, 10 exemplaires devaient tout d'abord être produits mais en fait un seul fut effectivement assemblé. Le KV-9 fut conçu comme un char multifonctions capable aussi bien d'être utilisé comme canon d'assaut contre les fortifications ennemies que comme char de combat contre les chars adverses.
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Le KV-9 pesait 47 t et avait un équipage de 4 hommes. Il possédait également une nouvelle tourelle moulée et un blindage maximum de 135mm, ce qui était énorme pour l'époque. Le blindage du toit de la tourelle était de 40mm. Le canon U-11 de 122mm avait une élévation de +19,5° et une dépression de -4°, et était équipée d'une lunette télescopique TMFD. La charge utile en munitions était de 48 obus de 122mm et de 2 646 cartouches de 7,62mm.
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KV-1 avec canon court U-11 de 122mm. Un prototype fut construit et éprouvé en 1941. -
KV-10 (KV-1K) (Obyekt 230) (1942)
KV-1 avec 4 lance-roquettes sur les flancs de sa caisse. Chaque lanceur contenait 2 roquettes M-13 de 132mm. La première variante du KV-1K avait 2 lanceurs à l'arrière de la caisse, chacun contenant 6 roquettes. Un prototype fut construit et testé en 1942. Non mis en service.
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KV-11 (Obyekt 231) (1942)
KV-1 armé d'un canon F-30 de 85mm. Projeté en 1942. Non construit.
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Ce à quoi il devrait ressembler. -
KV-12 (Obyekt 232) (1942)
En 1942, le nouveau bureau de conception de l'usine n°100 proposa une nouvelle version du char lance-flammes, basée sur la série KV-1. Le chef de projet désigné était l'ingénieur S. Fedorenko. Contrairement au KV-8, les ingénieurs de l'usine n°100 conservèrent l'armement principal, laissant un canon de 76,2mm et 2 mitrailleuses de 7,62mm. Le lance-flammes était situé dans la tôle de caisse avant, démontant le canon de course. Le boîtier fut également soudé avec des supports de montage pour la fixation des réservoirs et des cloisons pour les tubes à air (ces derniers étaient situés sur les clôtures et les étagères). La masse à vide de l'équipement du lance-flammes était de 2 t, hors ravitaillement, dont le volume total, selon les produits chimiques, variait de 0,4 à 1,2 t. La libération du mélange inflammable était effectuée par de l'air comprimé à partir de 2 bouteilles standard de 27 L chacune. L'équipement était protégé par une cloison blindée avant de 30mm d'épaisseur, et les blindages arrière, latéraux et supérieurs ne dépassaient pas 12mm. La construction du premier KV-12 fut réalisée en avril-mai 1942. Comme tous les KV de série allaient au front, l'usine fut équipée d'un KV-1 « non comptabilisé » de la première série (n°6728), qui fut utilisé pour divers types de travaux expérimentaux. Le char avait beaucoup de défauts dans la caisse et la tourelle, mais il n'y avait pas d'autre choix pour l’équipe de Fedorenko. En mai 1942, le KV-12 complètement prêt fut transféré aux tests d'usine. En termes de données tactiques et techniques, cette machine était quelque peu supérieure au KV-8, mais afin de ne pas ralentir le rythme de la production en série, le KV-12 fut abandonné.
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KV-12M (1942)
Version chimique du KV-12, soit le remplacement des réservoirs du lance-flamme par d’autres contenant des toxines.
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KV-13 (IS Model 1) (Obyekt 233) (1942)
Le premier prototype du KV-13 fut fabriqué au printemps 1942, mais à l'automne de cette année-là, des tests montrèrent un manque de fiabilité mécanique et démontrèrent la nécessité de renforcer le blindage du véhicule et de l'équiper de la nouvelle tourelle triplace. Alors que la production de 2 prototypes modifiés commença en décembre 1942, les travaux sur le KV-13 en tant que char moyen furent interrompus en faveur de la poursuite de la production du T-34. Le développement ultérieur du projet utilisant 2 prototypes KV-13 modifiés conduisit à la création en 1943 de l’IS-1. Ce char ne fut jamais utilisé au combat.
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La poursuite du développement du projet conduisit à la création en 1943 de l’IS-1. -
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KV-13 Model 2
Un KV-13, avec tourelle et armement d'un KV-9. Un prototype fut construit et éprouvé en 1943. Le char avait perdu la concurrence face à l’IS et ne fut donc pas mis en service.
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Model 2 à gauche.
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KV-85 (Obyekt 239) (1943)
Voir KV-85.
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KV-85G (Obyekt 238)
KV-1S avec canon S-31 de 85mm. La tourelle et le mantelet restèrent celui du KV-1S conventionnel. Cette variante était une concurrente du KV-85 lors des essais. Il perdit la compétition et ne fut pas mis en service.
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KV-122 (1943)
KV-1S avec un obusier court S-41 de 122mm. Un prototype fut fabriqué en 1943. Non mis en service.
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U-18 (1941)
Canon automoteur expérimental. KV-7 armé d'un canon ML-20 de 152mm. Le véhicule fut projeté en 1941. Une maquette en bois fut construite. Le projet fut annulé, mais ce véhicule était un premier pas vers la conception du SU-152. Voir SU-152.
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S-51 (U-19) (1944)
Voir S-51.
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ZiK-20
Le ZiK-20 était très similaire au S-51, mais avait 105mm de blindage frontal, 75mm en latéral, et devait monter un canon ML-20. Au moment où sa maquette en bois fut réalisée, le KV-1 fut progressivement retiré de la production. Cependant juste avant l'annulation du projet, un plan fut élaboré pour équiper le ZiK-20 d'un canon Br-2 de 152,4mm, et pour compenser le poids, le blindage frontal devait être réduit à 75mm (ou 60mm sur le châssis du KV-1S).
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KV-T
Version de récupération sans tourelle.
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Autres
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KV-1 avec dispositif de déminage.
Kliment Vorochilov 1
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En Action
En dehors de l'utilisation expérimentale du KV dans la Guerre d’Hiver, le char entra au combat pour la première fois après l'attaque allemande contre l'URSS. Les toutes premières rencontres des tankistes allemands avec le KV les mirent en état de choc. Le char était quasiment invulnérable à la plupart des canons allemands (par exemple, une APCR allemande de 50mm perça le côté vertical du KV à une distance de 300 m, et un front incliné uniquement d’une distance de 40 m sans effets). L'artillerie antichar était également inefficace : par exemple, l’AP du canon PaK 38 de 50mm permettait de frapper le KV dans des conditions favorables à une distance de seulement moins de 500 m. Les 88 étaient plus efficaces. Cependant, le char était brut : la nouveauté de la conception et la hâte de l'introduire dans la production l’affecta. La transmission, qui ne pouvait pas supporter les charges d'un char lourd, causait surtout beaucoup de problèmes : elle se cassaient souvent. Et, si dans une bataille ouverte, le KV n'avait vraiment pas d'égal, alors dans les conditions de retraite, de nombreux KV, même avec des pannes mineures, devaient être abandonnés ou détruits. Il n'y avait aucun moyen de les réparer ou de les évacuer. Plusieurs KV, abandonnés ou endommagés, furent restaurés par les Allemands. Cependant, les KV capturés furent utilisés pendant une courte période : le manque de pièces de rechange les affecta avec les mêmes pannes fréquentes.
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Des KV-1, assemblés pendant le siège de Leningrad à l'usine n°371, sont envoyés au front depuis la Place Uritsky (aujourd'hui la Place du Palais) à Leningrad, mai 1942. -
Le KV provoqua des évaluations contradictoires de l'armée. D'une part, son invulnérabilité et d'autre part sa fiabilité insuffisante. Et avec sa capacité tout-terrain n’était pas toujours au rendez-vous : le char pouvait difficilement surmonter des pentes abruptes, de nombreux ponts ne pouvaient pas y résister. De plus, il détruisait les routes sur lequel il roulait ; les véhicules à roues ne pouvaient plus se déplacer derrière lui, c'est pourquoi le KV était toujours placé en bout de colonne. D'autre part, le char se montra parfaitement apte sur le champ de bataille, lors de l'organisation d'embuscades de chars et de contre-attaques par des colonnes mécanisées allemandes. En général, selon certains contemporains, le KV n'avait aucun avantage particulier par rapport au T-34. Les chars avaient la même puissance de feu, les deux étaient moins vulnérables à l'artillerie antichar. Dans le même temps, le T-34 avait les meilleures caractéristiques dynamiques, était moins cher et plus facile à fabriquer, ce qui est important en temps de guerre. Les inconvénients du KV incluent également l'emplacement malheureux des écoutilles (par exemple, il n'y a qu'une seule écoutille dans la tourelle, en cas d'incendie, il était très difficile pour les membres de sortir rapidement). L'équipage d’un KV-1 près de la ville de Raseiniai (en Lituanie) en juin 1941 retint le Groupe de Combat de la 6ème Panzerdivision du général F. Landgraf, équipé principalement de Pz. 35(t), pour un jour. Cette bataille fut décrite par le commandant de la 6ème Brigade d'Infanterie Motorisée de la division E. Raus (commandant du Groupe de Combat). L'un des KV lors de la bataille du 24 juin tourna à gauche et prit position sur la route parallèle à la direction du Groupe de Combat sous le commandement du lieutenant-colonel E. von Seckendorf, étant derrière le celui de Raus. Le KV-1 arrêta pendant un certain temps le Groupe de Combat de Seckendorf, qui représentait un peu moins de la moitié de la division de chars. Cet épisode devint la base de la légende selon laquelle un KV aurait arrêté tout le 4ème Groupe de Chars allemands du colonel général E. Hoepner. Le journal de combat du 11ème Régiment de Chars de la 6ème Division de Chars se lit comme suit : « La prise de pied du Groupe de Combat de Raus fut maintenue. Avant midi, en réserve, la compagnie renforcée et le QG du 65ème Bataillon de Chars furent repoussés le long de la route de gauche jusqu'au carrefour au nord-est de Raseiniai. Pendant ce temps, un char lourd russe bloquait les communications du Groupe de Combat de Raus. De ce fait, la communication avec Raus fut interrompue pendant tout l'après-midi et la nuit suivante. La Flak de 88 fut envoyée par le commandant pour combattre ce char. Mais ses actions furent aussi infructueuses que la batterie de 10,5 cm, qui tira sur les instructions de l'observateur avancé. De plus, une tentative d'un groupe d'assaut de sapeurs pour faire sauter le char échoua. Il était impossible de s'approcher du char à cause des tirs nourris de mitrailleuses. » Le seul KV en question combattu avec le Groupe de Combat de Seckendorf. Après un raid nocturne de sapeurs, qui ne fit qu'égratigner le char, ils furent engagés pour la deuxième fois à l'aide d'un canon AA de 88mm, qu'ils réussirent à installer derrière le char. Un groupe de Pz. 35(t) distrait le KV avec leur mouvement, et l'équipage de la FlaK de 8,8 cm marqua 6 coups sûrs sur le char, mais seuls 3 réussirent à pénétrer le blindage du char. Cependant, l'héroïsme et le courage des membres d'équipage du seul KV-1 soviétique impressionnèrent l'ennemi. Il devint évident pour les soldats allemands que les tankistes soviétiques, dotés d'un excellent équipement militaire, seraient un adversaire sérieux, et la guerre serait difficile et longue même avec son début catastrophique. Des tankistes soviétiques inconnus morts furent enterrés par les Allemands avec les honneurs militaires.
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KV-1 détruit après les combats de Kovno, été 1941. -
C'est sur le KV que le lieutenant principal Zinovy Kolobanov (1ère Panzerdivision) combattu, lors d'une bataille le 20 août 1941 (la date du 19 août fut mentionnée à tort dans le journalisme d'après-guerre) près de Gatchina (Krasnogvardeisky), qui détruit 22 chars allemands et 2 canons antichars, et le lieutenant Semyon Konovalov (15ème Brigade de Chars), lors de la bataille du 13 juillet 1942, dans la zone de la ferme de Nizhnemityakin, district de Tarasovsky, région de Rostov, 16 chars ennemis et 2 véhicules blindés. Afin d'éliminer de nombreuses plaintes à l'été 1942, le char fut modernisé. En réduisant l'épaisseur du blindage, le poids du véhicule diminua. Divers défauts majeurs et mineurs furent éliminés, y compris la « cécité » (une coupole de commandant fut installée). Cette nouvelle version était KV-1S. La création des KV-1 était une étape justifiée dans la difficile première étape de la guerre. Cependant, cette étape ne fit que rapprocher le KV des chars moyens. L'armée ne reçut jamais de char lourd à part entière (selon les normes ultérieures), ce qui différerait fortement de la moyenne en termes de puissance de combat. Armer le char avec un canon de 85mm pourrait être une telle étape. Mais les choses n’allèrent pas plus loin que les expériences, car les canons de 76mm en 1941-1942 étaient efficace contre n'importe quel véhicule blindé allemand, et il n'y avait aucune raison de renforcer les armes. Cependant, après l'apparition dans l'armée allemande du Tiger avec un canon de 88mm, tous les KV devinrent obsolètes du jour au lendemain : ils n’étaient pas en mesure de combattre les chars lourds allemands à armes égales. Ainsi, par exemple, le 12 février 1943, lors d'une des batailles pour briser le blocus de Leningrad, 3 Tiger de la 1ère Compagnie du 502ème Bataillon de Chars Lourds détruisirent 10 KV. Dans le même temps, les Allemands ne subirent aucune perte, ils pouvaient tirer sur les KV des distances sécurisées. La situation à l'été 1941 était exactement le contraire.
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KV-1 Mod. 1941 à tourelle moulée fut équipé d'un canon ZiS-2 de 57mm. Les galets sont du type tardif. Il s'est déplacé sur un autre KV-1 Mod. 1941 avec tourelle moulée. Les deux ont brûlé, 1943. -
Les KV de toutes les modifications furent utilisé jusqu'à la toute fin de la guerre. Mais ils furent progressivement remplacés par les IS plus avancés. Ironiquement, la dernière opération dans laquelle les KV furent utilisés en grand nombre fut la percée du mur de Carélie en 1944. Le commandant du front carélien, K.A. Meretskov, insista personnellement pour que son front reçoive le KV (Meretskov commanda l'armée pendant la Guerre d'Hiver et tomba ensuite littéralement sous le charme de ce char). Les KV survivants furent collectés littéralement un à la fois et envoyés en Carélie, à l'endroit où la carrière de ce char commença. À cette époque, un petit nombre de KV étaient encore utilisés. Fondamentalement, après le démantèlement de la tourelle, ils servirent de véhicules d'évacuation dans des unités équipées des nouveaux IS. La dernière période d'utilisation massive des KV fut la Guerre Soviéto-Japonaise de 1945. Le Front Trans-Baïkal comprenait 2 régiments de KV avec 35 chars chacun. Des chars furent utilisés lors de l'assaut contre la ville de Mudanjiang et la zone fortifiée de l'Armée du Kwantung du même nom.
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Un Kradschütze examine un impressionnant KV-1e Mod. 1940. Mécaniquement peu fiable et ankylosé par le surcroit de poids de ses plaques de blindage additionnelles, ce char fut surtout la proie des pannes, 1941.